Séminaires

JOURNÉE JAPON À LILLE -
"LE NOUVEAU JAPON ET SES SECTEURS PORTEURS"

26 juin 2003, Lille

Initiative née du partenariat entre la Chambre de Commerce et d’Industrie de Lille Métropole et JETRO Paris, cette journée s'est tenue au Centre international d’EURALILLE où plusieurs entreprises de la région Nord sont venues faire part de leur expérience au Japon. Nos experts en investissements et pour l’exportation, les représentants des collectivités locales japonaises et des maisons de commerce ont reçu les participants à leur demande, en entretien individuel pendant toute la seconde partie de cette journée.

Programme de la journée


En cliquant sur l'intitulé d'une intervention, vous serez dirigé vers son compte-rendu.

10h00 Allocution d’ouverture

10h10 Interventions

11h05 Témoignages de trois entreprises de la région ayant réussi au Japon

10h50 Questions & Réponses
12h10 Clôture des débats

12h15 Cocktail organisé par M.Patrick LESAFFRE, Consul Honoraire du Japon
   Présentation d’un projet de jardin japonais à Lille
13h00 Déjeuner Hôtel Crown Plazza
14h00 Entretiens individuels

Compte-rendu des interventions


ALLOCUTION D'OUVERTURE
Bruno BONDUELLE, Premier Vice-Président de la CCI de Lille Métropole
Bruno Bonduelle s’est félicité de l’organisation de ce séminaire et d’accueillir une délégation japonaise dans l’Espace International de Lille qui rassemble tous les acteurs du développement international de la région Nord-Pas-de-Calais.
Les relations avec le Japon datent de plus de trente ans avec l’implantation de la société YKK suivie de Bridgestone à Béthune, Ajinomoto à Dunkerque ou encore Sigma à Lille. Aujourd’hui, cent familles japonaises vivent à Lille, un Consulat du Japon y est installé en la personne de M. Lesaffre, grand industriel de la levure et du malt. Toyota a décidé d’augmenter de 50% sa production dans l’usine de Valenciennes, considérée comme la plus productive de toutes les usines d’Europe.
Ainsi, pour saluer cette présence japonaise, la CCI de Lille Métropole a pris l’initiative de créer en 1999 un Club Nord-pas-de-Calais rassemblant tous les mois la communauté japonaise et celle du Nord-pas-de-Calais. Le Japon est un interlocuteur de poids et plus de 5 000 emplois dépendent de firmes à capitaux japonais.

LES ALLIANCES COMMERCIALES ET ÉCONOMIQUES FRANCO-JAPONAISES
Tsuyoshi NAKAI, Directeur Général de JETRO Paris,
Bureau de coordination pour l’Europe et de représentation pour la France et pour le Maghreb

Le thème de son allocution a porté sur les alliances commerciales et économiques franco-japonaises. En réponse aux difficultés économiques du Japon, des réformes structurelles de l’économie ont dû être mises en place :
  • Restructuration du secteur bancaire
  • Création d’une société baptisée " Industrial Revitalization Corporation of Japan "
  • Installation de zones dites " Special Zones for Structural Reform "
  • Promotion de la décentralisation

Tsuyoshi Nakai a souligné la place de la France en tant que premier investisseur au Japon en 1999 (grâce à la prise de participation de Renault dans le capital de Nissan). Il a cité d’autres exemples d’alliances franco-japonaises qui témoignent de la réussite des coopérations entre les entreprises françaises et japonaises : Air Liquide et Osk, PSA Peugeot Citroen et Toyota, Arcelor et New Nippon Steel.
Tsuyoshi Nakai a fourni une information factuelle et inédite sur les opportunités d’affaires et d’investissement des entreprises françaises sur le marché japonais. Les dix avantages suivants ont été mis en avant pour encourager l’investissement au Japon. Le Japon est synonyme de :
  1. Deuxième marché du monde
  2. Centre d’affaires des économies émergentes asiatiques
  3. Ressources humaines hautement qualifiées et abondantes
  4. Technologies innovantes
  5. Infrastructures efficaces au service d’activités commerciales dynamiques
  6. Nouveau cadre juridique réformé pour faciliter les investissements
  7. Coûts d’activités moins élévés qu’auparavant
  8. Nombreuses opportunités de marchés
  9. Cadre de vie très agréable
  10. Quelques exemples d’implantations récentes et d’investissements réussis :
    • Technologies de l’information et des télécommunications : Avaya, Amazon.com, Jabil Circuit
    • Services et soins médicaux : Novartis, Roche
    • Commerce de gros et de détail : Costco Wholesale, Carrefour, Metro, Wal-Mart
    • Finance : Axa Group, AIG, Prudential

Le Directeur Général de JETRO conclut en invitant les entreprises françaises à se rapprocher de JETRO qui s’efforcera de les accompagner dans leur démarche d’implantation.

LE NOUVEAU JAPON ET SES SECTEURS PORTEURS
Yoshihiro SAWADA, Conseiller en investissements JETRO / DREE
Yoshihiro Sawada a présenté l’environnement des affaires ainsi que les secteurs porteurs au Japon. Neuf secteurs sont répertoriés comme les plus prometteurs au Japon : la finance, l’assurance, les technologies de l’information et des télécommunications, la distribution, le médical, le bien-être, l’environnement et le recyclage, les bio-technologies, les nano technologies. Quatre de ces secteurs très prometteurs ont été détaillés :
  • Les technologies de l’information et de la communication
    Le Japon cherche à devenir le pays le plus avancé en termes de TIC en 2005, notamment grâce à la stratégie e-Japan lancée par le gouvernement japonais en janvier 2001.
  • L’environnement
    Le Japon est l’un des pays les plus avancés notamment dans l’assainissement des sols pollués et est l’un des premiers en matière de production d’énergie solaire.
  • Les biotechnologies
    Le marché des biotechnologies atteindra 25 000 milliards de yens en 2010. Trois domaines s’avèrent prometteurs : la médecine régénératrice avec des cellules de tige embryonnaire, l’analyse des protéines, les produits alimentaires fonctionnels.
  • Les nanotechnologies, secteur dans lequel le Japon est numéro 1 mondial.

Yoshihiro Sawada a souhaité démystifier un ensemble d’idées reçues qui décrivent trop souvent le marché japonais comme un marché difficile, fermé, surexigeant ou encore réservé uniquement à des grands groupes industriels ou aux grandes marques. Il est vrai que les entreprises françaises rencontrent souvent des difficultés concernant l’identification de leur partenaire, la confrontation à des cultures d’entreprises différentes, le manque d’information sur les industries ou les marchés ou encore la pénétration des produits sur le marché japonais.
Cependant, quelques clés peuvent leur assurer le succès sur le marché japonais:
  • Proposer des produits de qualité et originaux
  • Posséder des technologies innovatrices
  • Faire preuve de dynamisme en terme de marketing
  • Considérer le client " comme un dieu "
  • Se munir de patience dans la négociation.

En guise de conclusion, le conseiller de JETRO a décrit les nombreux efforts déployés par JETRO pour soutenir les investissements étrangers au Japon. Il a notamment cité l’existence d’un guichet unique (One Stop Center) mis en place pour informer tout importateur potentiel étranger au Japon.

FILIÈRE JAPON POUR LE NORD PAS DE CALAIS
Mathilde BENDLER, Conseillère en développement international sur le Japon et les Etats-Unis, responsable de la filière Japon pour le Nord Pas de Calais
"Halte à la sinistrose", tel est le ton qu’a souhaité donner Mathilde Bendler à cette journée. Les titres des journaux dressent trop souvent un tableau noir de la situation économique au Japon alors que la crise doit être relativisée. Les ventes de Vuitton au Japon ne se sont jamais aussi bien portées et, de son côte, Hermès a par exemple ouvert un immeuble entier à Ginza : le secteur du luxe se porte extrêmement bien.
La crise japonaise est donc bien plus " lue que vue " : le Japon reste la deuxième puissance économique du monde avec ses 126 millions d’habitants et son niveau de vie des plus élevés (le revenu moyen d’un Japonais est de 60 000 euros contre 20 000 euros pour un Français). Les Japonais consomment énormément, possèdent de grandes capacités en recherche et développement, et le Japon reste le modèle asiatique. Il est une porte d’entrée sur l’ensemble du continent asiatique.
Les principales actions de la filière Japon pour le Nord pas de Calais sont déclinées comme suit :
  1. Développer et sensibiliser les entreprises du Nord pas de Calais par des actions d’information et de sensibilisation :
    • Organisation de réunions d’information sur les différents marchés porteurs.
    • Formations à la négociation avec les Japonais : formations gratuites qui permettent d’éviter de commettre quelques petits faux pas ou de perdre du temps lorsque l’on se rend au Japon.
    • Séminaires de présentation et d’information sur les différents programmes européens. Il existe par exemple un programme très performant " Gateway to Japan " qui couvre de nombreux secteurs d’activité : c’est un outil qui permet une excellente prospection à moindres coûts au Japon.
    • Mise en relation avec le réseau (JETRO, Chambre de Commerce Française à l’étranger, missions économiques)
    • Aide pour les procédures Coface et aides régionales.
  2. Accompagner les entreprises françaises sur le marché japonais :
    • Organisation de missions individuelles ou collectives. Toute mission commence par une radiographie de l’entreprise, puis un diagnostic produit/ marché afin de vérifier que le produit est bien en adéquation avec le marché japonais.
    • Prise de rendez-vous ciblés avec des entreprises japonaises.
      La préparation est indispensable avant un départ au Japon : il ne faut pas partir à l’aventure.
  3. Initier et soutenir des actions sur le terrain et les relations entre les entreprises du NPC et les entreprises japonaises implantées en France :
    Le Club Japon Lille Nord pas de Calais a été créé de manière à:
    • Renforcer les liens économiques et culturels entre la Région Nord Pas de Calais et le Japon
    • Favoriser l’insertion des familles japonaises en termes de logement, d’éducation, de santé et de culture.
    • Permettre aux communautés françaises et japonaises de se rencontrer et de favoriser les investissements réciproques en France et au Japon.

Le Japon : du passé à l’avenir
Pour la Chambre de Commerce de Lille, le Japon est un véritable choix. En 1984, elle a effectué ses premières missions d’accompagnement, été jumelée en 1986 avec la Chambre de Commerce de Nagoya, puis a créé le Club Japon en 1999. En septembre 2003, elle organise une mission et, en 2004, s’apprête à participer à des salons comme Foodex, Automative Engenering Exhibition ou encore Biojapan. Enfin, elle prévoit de se joindre à l’exposition universelle qui aura lieu en 2005 à Aichi.

THÉRÈSE SUDRE : UN PARCOURS INHABITUEL - CRÉATRICE DE BIJOUX
Thérèse SUDRE, Directrice Générale
Dessinatrice et créatrice de bijoux originaux et exclusifs, Thérèse Sudre a remporté plusieurs prix et participé à de nombreux salons qui l’ont amenée, en 1992, à se lancer dans l’exportation. Invitée au Japon par les magasins Seibu pour une exposition, elle fut remarquée pour ses créations aux matériaux innovants et put à cette occasion conclure une première commande de 350 pièces (l’équivalent de 600 000 à 700 000 francs). Cette première expérience lui fit croire que le marché japonais était facile d’accès, qu’il suffisait de s’y rendre pour que cela fonctionne, mais, l’année suivante, elle déchantait, n’ayant sans doute pas assez préparé sa mission.

A l’occasion d’une autre exposition de bijoux qui se tenait à New Delhi, elle put rencontrer des créateurs de différents pays et notamment des Japonais. Il s’agissait de la société Taj Entreprise (avec Kazuo Ogawa comme créateur ) avec laquelle elle tenta de faire affaire au Japon. Ils essayèrent de la présenter à de très grosses sociétés japonaises qui semblaient être intéressées par ses bijoux mais qui ont finalement abandonné car elles ont eu peur que ces créations soient trop vite copiées. Rien ne s’est donc concrétisé et elle prit alors conscience que ce marché était finalement beaucoup plus difficile que ce qu’elle avait pu imaginer. Une dizaine d’années plus tard (en 1996), elle retourna au Japon alors qu’elle était devenue fabricant officiel. Grâce à des amis créateurs qui exposaient depuis quelques années au Salon IJT (International Jewelry Tokyo : Salon professionnel de la bijouterie), elle put reprendre contact avec les Japonais qu’elle avait rencontrés auparavant. Séduits par l’évolution de sa collection, ils sont devenus son agent exclusif. Les affaires ont alors très bien marché pendant trois-quatre ans et puis ce fut le début de la crise. Toutefois, sur les encouragements de la Chambre de Commerce Lille, Thèrèse Sudre se décide à poursuivre l’aventure. Depuis, elle a conclu ses plus importantes commandes en retournant au salon IJT et y fit son meilleur chiffre d’affaires.

WESTAFLEX AUTOMOTIVE GROUP : L'EXEMPLE D'UN PARTENARIAT FRANCO-JAPONAIS
Gilles VERSTRAETE, Directeur Général
La société Westaflex produit des conduits techniques pour l’automobile et possède une usine installée à Roubaix depuis 1958. Il s’agit d’une PME indépendante qui travaille en premier rang (livraison directe auprès des constructeurs automobiles). Depuis 1997, le groupe travaille à 100% dans l’automobile et a eu, ces dernières années, une croissance rapide : de l’ordre de 20% chaque année (2003 exceptée). Le groupe prévoit pour 2004 une croissance de l’ordre de 19%.

La société emploie 560 personnes et le niveau d’investissement a toujours été élevé. Elle a développé un certain nombre de partenariats à l’international par la création de "joint venture". Travaillant avec les constructeurs automobiles, le groupe se doit d’être présent là où ceux-ci lui demandent de l’être. Ainsi ont-ils développé aux Etats-Unis une première joint venture pour Ford, puis une en Corée pour Daewoo et finalement au Japon, d’abord pour Toyota et maintenant pour Nissan.

Ses principaux clients sont Renault et Peugeot, qui représentent 80% de son chiffre d’affaires. Le groupe cherche à développer ses activités à l’international et de nouveaux clients sont venus s’ajouter à sa liste : Fiat, Ferrari, Ford, Daewoo mais aussi Hyundai et Samsung, Toyota au Japon et plus récemment Nissan, Opel et, pour d’autres activités Ford, Volkswagen et Fiat.

La société possède une grande variété de production: elle fait principalement du traitement acoustique d’admission d’air ( afin que les véhicules répondent aux nouvelles normes d’émission de bruit ) et fabrique des conduits de recyclage de gaz d’échappement pour diminuer les émissions polluantes des véhicules automobiles.

L’expérience au Japon
Après la signature en 1997 d’un contrat de licence au Japon, la société a cédé en 2000 une deuxième licence mais cette fois-ci au travers d’une joint venture. Après quelques années de prise de connaissance, son partenaire japonais estimait qu’ils se connaissaient suffisamment pour bâtir et construire une société ensemble.
Les quelques conseils de Gilles Verstraete suite à son expérience au Japon :
  • Le temps passé au début n’est jamais perdu, même si cela semble pour nous parfois difficile à comprendre. Il y a toujours une étape nécessaire à prévoir pour la vérification du partage des objectifs, des volontés et des valeurs et c’est aussi un temps précieux pour les Japonais pour mesurer les risques et déjà travailler sur d’éventuels plans de correction et d’action.
  • C’est un investissement très rentable puisque la phase réalisation sera ensuite plus rapide que prévue et surtout plus efficace : c’est la grande différence entre une organisation à la "français" et une organisation à la "franco-japonaise".
Quelles peuvent être les caractéristiques d’une relation avec des Japonais ?
  • Sachez que l’on rencontre de nombreux interlocuteurs (et l’on y est souvent mal préparé), et que ces interlocuteurs auront bien préparé la réunion et en commun.
  • Préparez-vous également à devoir répondre à des questions précises, qui attendent des réponses précises.
  • Si vous ne voulez pas répondre, faites le comprendre gentiment. Mais le pire serait de détourner la question et de ne jamais répondre : pour un Japonais, cette attitude est incompréhensible.
  • Si vous ne savez pas répondre, dites-le ; demandez un délai pour obtenir cette réponse et respectez ce délai.
Ce sont, à mon sens, les principaux points à connaître lorsque l’on a des relations avec des Japonais.
D’autres paramètres sont à prendre en compte :
  • Le processus de décision est long et complexe et il est toujours respecté. N’espérez pas, "parce que c’est vous ", parce que vous vous sentez plus doués, arriver à faire que la décision soit prise dans un délai plus court, vous n’y arriverez pas.
  • Le processus fait l’objet d’un consensus et il arrivera que vous ayez en face de vous des Japonais qui ne sont pas d’accord avec la décision finale ( ils seront au moins d’accord sur un point : la décision aura été prise en prenant l’avis de chacun et dans le respect de ce processus de décision.)
  • Egalement, ne montrez jamais d’impatience, ce qui est parfois difficile pour nous Latins et veillez toujours à respecter l’horaire.
En conclusion, allez au Japon si :
  • Vous êtes fiers de votre entreprise et de votre pays ! (On a trop souvent le défaut lorsqu’on arrive dans un pays étranger de critiquer la France.)
  • Vous êtes certains de la valeur de vos produits : n’y allez pas si vous avez un doute sur la conformité ou le bon fonctionnement d’un produit, ce n’est vraiment pas un pays où il faut prendre ce genre de risques.
  • Vous êtes patients au début et réactifs ensuite : méfiez vous de l’apparente lenteur du début qui vous met dans un faux rythme et vous empêche d’être prêts lorsqu’il faut passer à l’action.
  • Vous savez respecter vos engagements et être prudents (il faut passer du temps pour trouver le bon partenaire) : le Japon demande une certaine sagesse.
    Et, grâce à tous ces éléments, vous ferez d’excellentes affaires au Japon.

L’expérience en France
Rencontrant quelques difficultés sur l’une de ses activités, la société Westaflex a engagé ses premières discussions avec son partenaire japonais en 2000. Ce qui a permis en 2001 la filialisation des activités Inox et la mise en œuvre d’un plan de redressement en partenariat, ainsi que la prise de participation de Maruyasu dans le capital à hauteur de 40%. L’activité qui générait 2,3 millions d’euros de perte est passée, l’année suivante, à 550K euros de bénéfice grâce au plan de redressement. A la différence du contexte précédemment décrit, il ne fallait pas perdre de temps. Le fait de bien se connaître et de pouvoir passer à l’action très rapidement a été très salutaire.
Que faut-il faire au plus vite ?
  • Adopter les méthodes qui conviennent : il y a un grand nombre de méthodes japonaises, de méthodes industrielles qui sont bien connues dans l’automobile notamment (souvent citées comme le Toyota Production System).
  • Les adapter à la mentalité française. Le plus délicat est de capter les véritables facteurs de réussite et de les adapter sans perdre l’essentiel !
Dans ce genre de situation, les données sont différentes. Vous serez en face de :
  • Français qu’il faut convaincre et qui ne sauront pas forcément de quelle manière gérer le projet.
  • Quelques Japonais qui viendront vous aider mais qui, à leur tour, rencontreront quelques difficultés. Ils sont loin de leurs bases et ils n’ont pas l’habitude de travailler seuls (il faut donc vite les intégrer à une équipe). De plus, ceux-ci se retrouvent face à de nombreux Français et le choc est sans doute tout aussi important pour eux qu’il peut l’être pour nous lorsque nous allons au Japon.
Vous ferez d’excellentes affaires en France avec des Japonais si vous êtes :
  • Certains de vos forces mais aussi conscients de vos faiblesses
  • Prêts à intégrer de nouveaux concepts
  • Suffisamment ouverts d’esprit
  • Impliqués et respectueux de vos engagements.
En conclusion, même si vous êtes parfois placés en situation difficile, vous ne pourrez, ensuite, qu’en apprécier d’autant plus votre réussite !

  • Qu’en est-il de la crise ?
    Certes, la crise est au Japon, les ventes sont de plus en plus difficiles mais les Japonais déploient beaucoup d’énergie pour que les affaires marchent. Elle a pu notamment participer à une exposition privée organisée par la société Taj à Sapporo où la princesse Hisako Takamado et près de 2000 personnes se sont rendues.
  • Quelles prévisions pour l’avenir ?
    Elle vient de signer un contrat avec la société Arthus-Bertrand (société parisienne) qui va reprendre la fabrication de ses bijoux tandis qu’elle continuera à concevoir et à dessiner les modèles.
    Ce témoignage montre à quel point la persévérance, le professionnalisme et l’originalité sont les principaux facteurs de réussite sur le marché japonais.

LESAFFRE : LEADER MONDIAL DANS LA FABRICATION DE LEVURE
Patrick LESAFFRE, Président Directeur Général, I.M.C/Grandes Malteries Modernes
Groupe né en 1853 de la rencontre de Messieurs Louis Lesaffre et Louis Bonduelle.
Ensemble, ils ont développé des affaires de sucrerie, levurerie et malterie jusqu’en 1901, date de leur séparation. Bonduelle se spécialise dans la conserverie et devient le premier conserveur européen. Lesaffre se spécialise dans l’industrie de la fermentation, des produits de levures de panification, de brasserie, d’œnologie et dans les biotechnologies. Le groupe s’adresse essentiellement à des professionnels. Implanté industriellement sur tous les continents, Lesaffre connaît une forte croissance externe ces dernières années et bénéficie des compétences et de l’engagement de plus de 6000 collaborateurs. Il dispose d’un centre de R&D de plus de 150 personnes multiculturelles.

Lesaffre est le numéro un mondial dans la levure et les ingrédients de panification, le numéro un mondial dans les extraits de levure et le numéro cinq mondial pour le malt. La société possède 46 implantations industrielles dans le monde dans 26 pays différents. En Europe, Lesaffre possède 19 levureries, 15 sociétés de commercialisation de levure, 3 unités de production d’extraits de levure, 1 malterie et, depuis peu, vient de signer une acquisition en Ukraine.
Aux USA, Lesaffre est le premier levurier et le premier malteur, avec 40% du marché pour la levure et 50% du marché pour le malt. En Amérique du Sud, le groupe possède des implantations industrielles en Argentine, au Costa Rica, au Brésil mais aussi au Chili. En Australie, le groupe possède une levurerie et une malterie près de Melbourne et une nouvelle acquisition en malterie s’est réalisée en Nouvelle Zélande (gros producteur en orge).
En Asie, les implantations sont localisées en Jordanie, en Indonésie, en Inde et depuis cinq ans en Chine. L’ensemble de l’Asie est dirigée par une société à Hong Kong. Au Japon, le groupe Lesaffre ne possède pas d’implantation industrielle mais est associé à une société de commercialisation située à Osaka, pour les levures et les produits dérivés. Depuis plus de trente ans, le groupe exporte vers le Japon et les exportations augmentent de 10% annuellement. Le Japon est un marché professionnel, exigeant une qualité des produits et des services. Aussi, pour y réussir, faut-il respecter cette rigueur de travail.

QUESTIONS ET RÉPONSES
Pourquoi n’avez-vous pas d’implantation industrielle au Japon alors que vous avez réussi à vous implanter aux USA, marché réputé difficile ?
  • Patrick LESAFFRE
    Il est vrai qu’il est très difficile de s’implanter aux USA. Mais pour le Japon, deux raisons majeures ne nous incitent pas à nous y implanter : la première est le manque de matières premières locales, la seconde, l’exigence des règles de dépollution.
    En levurerie -industrie produisant une pollution notable- il faudrait créer un centre de dépollution très important et onéreux. Par ailleurs, la fermeture des levureries japonaises est à prévoir en raison, d’une part, du manque de matières premières importées (mélasse), et d’autre part de l’exigence des règles de dépollution. Au Japon, les centres de dépollution revêtent une importance considérable et les Japonais évitent la production de produits susceptibles de polluer ; d’où une délocalisation vers l’étranger non seulement pour une question de coûts mais aussi pour des raisons de protection d’environnement.
    Probablement faudra-t-il construire une levurerie aux Philippines car la matière est là et que la dépollution peut s’opérer dans des conditions très correctes avec la capacité d’exporter vers le Japon.
    Par ailleurs, le gouvernement japonais s’oriente vers des mesures restrictives pour certaines industries y compris celles de la levurerie ; quant à l’industrie de la malterie, le Japon ne produisant pas d’orge, la question ne se pose pas.

Comment expliquez-vous ce phénomène d’accroissement de la consommation du blé et donc du pain dans toute l’Asie ?
Comment avez vous dû adapter vos produits au système digestif des Asiatiques différent de celui des Européens ?
  • Patrick LESAFFRE
    En Asie, le phénomène est relativement récent aussi bien pour le pain que pour la bière. La bière existe au Japon depuis 1873, elle a été créée par un Allemand qui a su développer sa première brasserie, tout de suite rachetée par des Japonais. Le développement de la bière et du pain date d’après la deuxième guerre mondiale, suite à l’internationalisation des échanges. Les Européens ont exporté leurs coutumes et manières de manger et de vivre.
    En Asie, y compris en Chine, l’augmentation de la consommation du pain s’élève en moyenne à 6% et celle de la bière à 10%. Ces chiffres sont équivalents au Vietnam mais plutôt en baisse au Japon.
    Le marché est bas, la consommation du pain est relativement faible avec comme concurrent le riz, matière de base pour les Asiatiques. Mais, il s’agit d’un marché prometteur avec 1 milliard 300 millions d’habitants en Chine, 1 milliard en Inde, 126 millions au Japon, 78.80 au Vietnam, 60 en Thaïlande, 45 en Birmanie. L’Asie et l’Amérique latine sont, pour Lesaffre, deux zones de prédilection.
    En ce qui concerne le corps humain, il est vrai que les réactions en termes de digestion sont un peu différentes et nous avons dû adapter nos levures à ces marchés pour permettre un transit intestinal similaire au transit intestinal européen.

Il est souvent dit que la réussite des Japonais dépendait surtout de leur extraordinaire capacité à copier, comment réagissez-vous à ces propos ?
  • Patrick LESAFFRE
    L’espionnage industriel existe dans tous les pays. Toute industrie de bio-technologies ou de hautes technologies est soumise à ce genre de risques. Ces propos semblent donc déplacés tout comme l’on prétend que le Japon est en crise. La copie est un fait international et n’est pas spécifiquement "japonais".

  • Rémy BABINET, Conseiller Technique, Responsable du Commerce International, CCI de Lille Métropole
    La plus moderne des usines est toujours celle qui a su le mieux copier ses précédentes. Il est donc de notre responsabilité de faire attention à ne pas donner prise à la copie vulgaire.

  • Tsuyoshi NAKAI
    Quelques mots concernant le droit de la propriété intellectuelle.
    Le Japon cherche actuellement à renforcer la protection des droits intellectuels à l’égard, non seulement des entreprises japonaises, mais également des entreprises étrangères. C’est dans ce cadre là que le Japon vient de mettre en œuvre une loi qui protège les droits de la propriété intellectuelle. Pour déposer un brevet, nous avons renforcé le nombre de personnel pour accélérer la procédure. Le gouvernement japonais est en train de négocier avec la Chine pour faire arrêter la contrefaçon. Dans les années 80, les Etats-Unis ont cherché à comprendre les méthodes de production " à la japonaise " et notamment les méthodes Toyota. C’est grâce à cette étude que, dans les années 90, les Etats-Unis ont acquis une compétitivité très importante. Etudier les points positifs d’un pays est un moyen de s’améliorer: c’est peut-être ce qui manque au Japon. Le Japon aurait intérêt à étudier les aspects positifs de la France et des Etats-Unis. C’est l’objectif du nouveau modèle de l’alliance franco-japonaise.

Comment expliquer que les entreprises d’agroalimentaires japonaises ne cherchent pas à conclure des accords de transfert pour produire de la levure avec Lesaffre, des entreprises comme Ajinomoto ?
  • Patrick LESAFFRE
    Ajinomoto n’est pas entré dans le domaine de recherche de la levure, ils ont des produits à plus forte valeur ajoutée, beaucoup plus high tech que les nôtres.

On a vu apparaître ces dernières années une grande variété de types de pains. Quelle est votre part d’intervention dans la création de nouveaux goûts et cet éventail diffère-t-il en fonction des régions du globe ?
  • Patrick LESAFFRE
    Lesaffre possède a son actif 2000 souches différentes de levure. Actuellement en France, nous produisons des pains de plus en plus sophistiqués avec un nombre très différent de types de farines (farine de seigle, d’orge...). La farine donne un goût bien spécifique mais le type de levure aussi. Le pain au levain est un pain fait de levures dont nous sommes les producteurs et qui donne ce petit goût d’antan au pain. Nous adaptons nos levures aux différents continents : la levure produite pour la France diffère de la levure produite pour la Turquie par exemple.

Quelles solutions pragmatiques peut-on proposer aux PME de la Région Nord Pas de Calais pour avoir une chance de s’exporter au Japon ?
  • Rémy BABINET
    Tout d’abord, un voyage au Japon ne doit pas se faire seul : une entreprise moyenne a aujourd’hui la possibilité de faire fonctionner un réseau avant de partir en mission. Celui-ci permet en effet d’organiser un ensemble de RDV auprès d’entreprises japonaises, qui se révèlent être souvent intéressants. Le voyage en mission est plus abordable et assure un pourcentage de réussite beaucoup plus élevé.
    Au Japon, il existe deux réseaux différents : le réseau de JETRO et le partenariat qui existe entre la CCI de Lille et la Chambre de Commerce et d’Industrie Française à Tokyo.
    Pour ce qui est des structures d’accueil aux entreprises japonaises en France, il est possible de participer au Club Nord Japon qui organise des rencontres mensuelles afin d’inciter les firmes japonaises à s’installer dans le Nord Pas de Calais (développer l’emploi, développer l’activité) et inversement. Nous nous imprégnons mutuellement de nos différences et c’est comme cela que nous avançons.

  • Tsuyoshi NAKAI
    Pour JETRO, les activités avec la Mission Economique ont une grande importance. Les grandes entreprises françaises ont les moyens de créer des joint ventures ou de pénétrer le marché japonais alors que les PME ou les PMI n’ont pas ces moyens ou ces informations. C’est là qu’intervient JETRO pour soutenir les entreprises françaises à collaborer avec les entreprises japonaises. Au Japon comme en France, les PME représentent 90% des entreprises : il y a donc un grand potentiel de développement. Si vous souhaitez des informations sur le marché japonais et sur les mesures d’aide, n’hésitez pas à contacter JETRO Paris.

CLÔTURE DES DÉBATS
Kiyoji KATAKAWA, Président de la Chambre de Commerce et d'industrie japonaise en France
En guise de conclusion, Monsieur Katakawa, président de la Chambre de Commerce et d’Industrie japonaise en France, s’est félicité de l’évolution extraordinaire des relations entre la France et le Japon, évolution notable depuis 1992. Aujourd’hui, 450 entreprises françaises sont implantées au Japon (premiers investisseurs étrangers au Japon en 1999 et 2000). Les secteurs se sont diversifiés et un panel très large d’entreprises y est représenté. Monsieur Katakawa s’est réjoui que la croissance des entreprises françaises prenne ainsi son envol.

Pour plus d'information


Patricia COHEN, chargée des relations extérieures
pcohen@jetroparis.fr
151 bis, rue Saint Honoré, 75001 Paris
Tél. 01 42 61 27 27 / Fax 01 42 61 19 46